La presse vient d'annoncer une forte affluence pour le maillot de l'équipe de France vendu à partir du 17 août dans la boutique de la FFF.

On vit une époque formidable. Tout le monde est content, c'est bien. Certes, j'entends ici et là des grincheux m'affirmer péremptoirement, à tout bout de champ, que les gens n'ont plus de sous. Allons bon !

Mais alors, si les gens n'ont plus de sous justement, qui achète ces maillots à 140 € alors qu'on sait que leur coût de fabrication n'excède pas 5 € ?

Je rejoins avec cette question celle que je vous proposais comme devoir de vacances il y a peu :

Mais alors, car c'est bien là la question, qui achète ce genre de contrefaçons ? Et pourquoi ?

Tentons de répondre à cette délicate question.

En principe, le consommateur, l'acheteur, est rationnel ; c'est-à-dire qu'il va faire l'achat le plus judicieux possible en fontion de ses moyens financiers.

Or dans le cas qui nous intéresse, l'acheteur va acquérir (dans la quasi-totalité des cas en toute connaissance de cause) des contrefaçons qui n'ont aucun intérêt. Pourquoi ?

La première motivation de cet acheteur tient à ce qu'on appelle la motivation hédoniste c'est-à-dire au fait de se faire plaisir.

L'acheteur de ces faux se dit que vu le prix, il ne risque pas grand chose. Vrai ou faux, après tout qu'importe, l'essentiel est de se faire plaisir, de se procurer de rêve à peu de frais en quelque sorte. A l'arrivée de la lettre contenant le " timbre ", l'acquéreur aura un bref moment de plaisir, un courrier de la sorte valant toujours mieux au final qu'une relance des impôts.

La deuxième motivation est la motivation oblative, le fait faire plaisir aux autres. Elle rejoint à mon sens dans le domaine philatélique la troisième dimension : la motivation d'autoexpression c'est-à-dire le fait de se valoriser.

En achetant ces reproductions sans intérêt, le client leur confère une valeur qui n'est plus pécuniaire mais affective. Il ne va pas garder son acquisition pour lui mais va la montrer, l'offrir ou l'échanger avec un collègue philatéliste.

Imaginez la scène : un ami vous montre une de ces reproductions sans intérêt qu'il vient d'acheter sur internet. La pièce en question peut alors faire l'objet d'une discussion plus ou moins longue (ce qui est souvent bon à prendre) et cet achat anecdotique aura donné l'illusion éphémère à son acquéreur d'être un philatéliste.

Même si vous lui indiquez, avec les précautions d'usage, que la pièce en question est un faux (ce que lui-même sait), votre ami aura du mal à admettre qu'il s'agit d'un faux.

Si si, croyez-moi. Comme celui qui vous jurera sa tête à couper qu'il connaît personnellement un élève qui a rendu copie blanche et qui a obtenu 20/20 à un devoir dont le titre était " Qu'est-ce que le courage ? ". Jamais cette personne ne voudra reconnaître qu'en réalité elle ne connaît pas cet élève. Normal puisqu'il s'agit d'une légende urbaine.

Au final, tout cela n'est pas très raisonnable. Mais à petite dose, convenons-en, ce n'est pas néfaste à la santé.

Bref, à mon sens, les acquéreurs de ces fabrications sans intérêt sont des grands enfants qui veulent ressentir le grand frisson, celui d'avoir réalisé l'affaire du siècle et ce, paradoxalement, en sachant pertinemment qu'ils achètent une reproduction.

Ils sont comme les naïfs se laissant prendre au jeu du bonneteau, vous savez, ce jeu où vous êtes toujours perdants.

Tout le monde sait qu'en jouant au bonneteau, on est sûr de perdre. Et pourtant, il y a toujours des joueurs. La nature humaine est ainsi faite. Il y aura toujours des dupes et toujours des margoulins pour les duper.

Et en voilà la preuve avec une capture d'écran d'Ebay des jours passés :

Faux

Chose à noter : plus la cote est importante et plus le faux se vend cher, alors que dans tous les cas son coût de revient est identique, c'est-à-dire proche de 0. Etonnant non ?